Kirk Biglione, sur
Medialoper :
« Comment évaluer l’expérience de lecture de longs textes de fiction sur le Kindle et sur l’iPhone ? J’ai concocté pour ceci quelque chose que j’ai appelé le « test Pynchon ». Les romans de Thomas Pynchon ont tendance à être plutôt longs, et à ce titre m’ont semblé parfaits pour mener à bien ce test. »
Longs, les romans de Pynchon ? Voir à ce propos Claro, traducteur de Contre-jour, sur le Clavier Cannibale. On peut aussi… lire Pynchon, et, pour affiner un peu son approche de l’auteur et de l’œuvre (« il écrit des livres longs » semble un peu…court ? ) , se procurer Face à Pynchon (éditions le Cherche Midi, collection Lot 49).
Kirk Biglione est probablement un lecteur de Pynchon : si pour son test il voulait choisir simplement un gros livre, le choix était vaste. Mais on comprendra en lisant la suite pourquoi il n’a pas choisi plutôt un best-seller… Résultats du test ? iPhone et Kindle renvoyés dos à dos. Mais attention, pas pour les mêmes raisons.
« Je devrais tout d’abord indiquer que ce « test Pynchon » est complètement hypothétique parce qu’il y n’y a pour l’instant aucun moyen (légal) de télécharger un roman de Thomas Pynchon pour le lire sur un iPhone. Peu importe, je suis absolument certain que je ne lirais jamais Contre-jour ou l’arc en ciel de la gravité sur un iPhone. Le iPhone n’est tout simplement pas fait pour lire de longs textes de fiction. Sans aucun doute, l’ergonomie du iPhone empêcherait une immersion dans le texte suffisante pour aller bien loin dans ma lecture. L’écran du iPhone est juste un peu trop petit, et la génération actuelle des logiciels de lecture sur iPhone est bizarre (« quirky »).
Je suis bien sûr au courant du fait qu’il y a des gens qui lisent des romans sur mobile ou sur PDA. Simplement, je ne suis pas l’un d’eux. Mais je n’exclus pas pour autant l’iPhone de la famille des terminaux de lecture pour livres numériques. Avec le logiciel adéquat, ce pourrait être un bon terminal de lecture pour des nouvelles et d’autres types de livres. En d’autres temres, l’iPhone a échoué au test Pynchon, mais il pourrait réussir le test George Saunders. »
Quid du Kindle ?
Le Kindle a échoué au test Pynchon : Malheureusement, le test Pynchon est tout aussi hypothétique sur le Kindle. À l’heure où j’écris ces lignes, aucun roman de Thomas Pynchon n’est disponible dans le Kindle store. (…)
Amazon propose actuellement 170 000 titres dans le Kindle store. Cela peut sembler beaucoup, mais c’est une petite part du nombre de livres imprimés disponibles sur Amazon. Si vous pensez sérieusement à acheter un Kindle, vous devriez passer un peu de temps à parcourir le catalogue Kindle , pour déterminer si oui ou non les titres disponibles correspondent à vos besoins de lecteur. Soyons justes avec Amazon : les éditeurs semblent décidés à prendre le train du Kindle, on peut donc espérer trouver dans l’année qui vient de plus en plus de titres. »
Cela dit, je dois indiquer que le Kindle est parfaitement adapté à la lecture de longs romans – il a été conçu pour cela. L’affichage e-Ink est confortable pour les yeux, la durée de vie de la batterie est plus que suffisante, et la taille du terminal semble un bon compromis entre portabilité et lisibilité. »
Les deux terminaux ont tous deux « échoué » à un test auquel aucun d’eux n’a pu, en définitive, participer, et cet article est un peu biaisé : l’auteur a déjà son opinion sur la capacité de chacun des terminaux à accueillir la lecture de longs ouvrages de fiction, et son « test Pynchon » est une manière de souligner la pauvreté actuelle des catalogues de livres numériques, limitation dont se plaignent depuis longtemps les adeptes précoces des liseuses : ce qui ne les empêche pas, même en France où l’offre commence à peine à se constituer, de développer des usages de lecture, qui mixent les titres tombés dans le domaine public, les fils RSS, les documents professionnels qu’ils auraient autrefois imprimé.
La suite de l’article est intéressante aussi : il y est question de la focalisation qui est faite, dans les discussions concernant livre papier/livre numérique, sur la littérature, qui ne représente qu’une fraction de la production éditoriale. A ceux qui évoquent inévitablement les qualités du livre imprimé en parlant de ‘la bonne odeur des livres », Kirk Biglione dit :
« Ce que ces amoureux du livre veulent dire en réalité, c’est qu’il aiment l’odeur de certains livres. Ils aiment l’odeur de l’idée platonicienne du roman parfait. Croyez-moi, ces gens n’aiment pas l’odeur de « Principes de la microéconomie ». »
Cela dit, la librairie du MK2 près de chez moi est ouverte le dimanche, et je vais m’en aller quérir le dernier Pynchon, et humer sa bonne odeur au soleil sur mon balcon…