Le commentaire très intéressant qu’Alain Pierrot a posté à la suite de mon billet : « qu’est-ce qu’un livre ? ».
Archives mensuelles : mars 2007
s’interroger collectivement, réfléchir ensemble
J’avais commencé à rédiger un commentaire en réponse à ce billet sur le blog du CNS de Clément Laberge, et comme il devenait bien trop long, j’en fais un billet pour teXtes.
Clément écrit notamment :
J’ai observé de près, depuis une quinzaine d’années que j’exerce mon métier de concepteur – réalisateur multimedia, tantôt en indépendant, tantôt dans des structures de diverses tailles, le monde de l’édition scolaire “papier”, tout comme celui de plus petites structures entièrement dédiées à la production multimédia. Les maisons d’édition obéissent aux règles qui régissent la vie des entreprises : il y est question de parts de marché, d’objectifs, de concurrence etc. Les maisons d’éditions ont un métier : éditer des ouvrages, c’est à dire mettre en contact des auteurs (généralement des enseignants) et des utilisateurs, enseignants et élèves. Elles accompagnent les auteurs dans la création des ouvrages, depuis la phase de conception jusqu’aux plus infimes détails de la réalisation. Il faut avoir vu l’effervescence qui règne dans une maison d’édition à cette période de l’année, alors que les fichiers des ouvrages doivent impérativement partir à l’impression dans quelques jours. Il serait bon de mieux faire connaître ce métier, pour que les fantasmes concernant l’édition privée cessent de polluer le débat.
L’”écosystème scolaire” est au coeur des préoccupations de l’éditeur. Il prend en permanence le pouls de l’école, s’inquiète de la moindre accélération, se préoccupe de sa plus petite irrégularité, pour anticiper les besoins, connaître les attentes, offrir des objets adaptés.
Des objets qui vont en se diversifiant , qui ont longtemps été et restent en majorité des livres, parfois accompagnés de cassettes, de CD, de transparents, de cahiers. Plus récemment des disquettes (et oui, souvenons-nous des disquettes…), des cédéroms, des ressources en ligne.
Le web 2.0 est une chance formidable pour les éditeurs : tout ce dont rêvaient ceux qui déjà misaient sur le numérique à l’époque des premiers cédéroms est aujourd’hui pratiquement en place : des connections rapides qui se généralisent, des équipements qui se banalisent, des utilisateurs qui ne paniquent plus devant un écran et un clavier. Des technologies moins coûteuses (il faut aussi se souvenir des coûts de développement d’un cédérom en 1995…), plus performantes, des outils de création simples à utiliser, et des façons d’échanger efficaces et inédites.
Je ne crois pas du tout que le développement des échanges de ressources entre enseignants soit une menace pour les éditeurs. Bien au contraire, c’est une occasion formidable de découvrir des auteurs, d’entrer en contact avec les enseignants.
L’éditeur scolaire a une particularité, il n’a pas 30 élèves qui l’attendent chaque matin dans sa classe : il peut consacrer tout son temps et son savoir-faire à fabriquer les ressources qui aideront l’enseignant à faire son métier. Il doit aussi, en ces temps de mutation, consacrer une part non négligeable de ce temps à réfléchir, à imaginer les objets éditoriaux de demain, ceux qui accompagneront la pédagogie de demain. Et ce qui est formidable, c’est de ne plus devoir y réfléchir tout seul… N’est-ce pas ?
Qu’est-ce qu’un livre ?
Je sais, on dirait un peu un sujet d’examen, mais c’est pourtant une question tout à fait d’actualité… Elle a été posée hier par l’un de ceux qui assistaient à une rencontre débat autour de l’ePaper, qui réunissait Lorenzo Soccavo (l’auteur de Gutemberg 2.0, dont j’ai déjà parlé), Bruno Rives (Tebaldo), Jean-Pierre Arbon (co-fondateur de 0h00.com, aujourd’hui chanteur), Philippe Colombet (Google France). Comme presque toujours, lorsqu’il est question du livre, surtout lorsque l’on s’interroge sur son avenir, la confusion guettait. Quelques divergences sont vite apparues entre ceux (les principaux acteurs étaient dans la salle) qui participèrent au « début du siècle » à l’aventure de l’eBook version Cytale et équivalents, et ceux qui relancent l’affaire aujourd’hui, avec des lecteurs dont la technologie a évolué. Les « modernes » attribuant l’échec de l’eBook 1ère version à la mauvaise qualité des lecteurs (lourds, illisibles au soleil), les « anciens » soutenant que l’échec n’était pas imputable en priorité à la technologie, mais bien plutôt à un ensemble de facteurs ayant trait à des difficultés de commercialisation, à des problèmes de ciblage, à la difficulté de modifier les habitudes. Deux définitions divergentes du livre se mesuraient à travers ce débat : d’une part le livre comme « support de lecture », objet destiné à permettre la lecture, auquel se subsituerait immanquablement un support nouveau, dès que celui-ci serait technologiquement au point, et comporterait des avantages le rendant supérieur à l’actuel livre en papier. Et d’autre part le livre comme œuvre de l’esprit, comme émanation d’une relation complexe auteur(s) / éditeur / libraire / lecteur, inscrit dans un système (la chaîne du livre).
Le fait de modifier l’un des composants du livre, en l’occurrence son « mode d’affichage », oblige à se reposer la question de sa définition, que l’évidence d’un objet qui a si largement fait ses preuves rendait superflue.
Est-ce qu’un texte qu’on consulte sur un écran est encore un livre ? À partir de quand un livre n’est plus un livre ? Est-ce à la qualité de l’écran du « reader » que se mesure son droit à être nommé un livre ?
Ce n’est pas un hasard, je crois, si l’on cherche actuellement, et si l’on a bien du mal à trouver, comme l’a indiqué Bruno Rives, un équivalent français pour l’anglais « eReader ».
Et je continue de me de vous demander : qu’est-ce qu’un livre ?
Et si on mettait un livre…
On « met un disque », c’est un geste bref, qui précède l’écoute. On ne « met » pas un livre. Tout le temps qu’on lit, on est en compagnie du livre. On est en contact avec lui. On le touche. On le regarde. On le manipule. (La photo illustrant l’affiche du Salon du Livre joue sur ce décalage, sur la confusion des sens, en montrant un personnage serrant des livres contre ses oreilles, et semblant tirer un intense plaisir de cette expérience…)
Que mon casque soit branché sur un Walkman ou sur un iPod, que j’écoute un opéra en insérant un CD dans le lecteur ou bien en branchant mon iPod sur ma chaîne, l’expérience musicale n’est pas radicalement différente. Mais nous savons tous que lire sur un écran ou sur du papier ne produit pas la même impression, et que lire sur un iLiad ou un Reader Sony ne sera pas une expérience exactement identique à celle de la lecture d’un livre traditionnel.
C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles la dématérialisation de la chaîne du livre ne s’opère pas à la même vitesse que celle du disque, même si elle semble s’accélérer fortement cette année, après son faux départ de 2001. Six ans plus tard, les technologies ont évolué, et il semble que sonnera bientôt la fin de l’heure des expérimentations : voir l’interview de Lorenzo Soccavo, auteur de « Gutenberg 2.0″ dans le BillautShow. (trouvé via Affordance).Ce qui me fait aimer la lecture sur écran, c’est la proximité que l’ordinateur permet entre lecture et écriture, et, avec internet, entre lecture, écriture et publication, au sens de la mise à disposition et de l’échange possible.
Je ne sais pas ce qui pourrait me faire aimer la lecture sur iBook, faute de l’avoir expérimentée.
En attendant de le faire, je m’interroge : pourrai-je prêter mes livres électroniques, comme j’aime tant le faire de mes livres papier ? À quelqu’un qui dispose du même modèle que moi, probablement. Mais quid des autres, qui disposeront d’un modèle différent, et des (pauvres) autres qui n’auront même pas d’iLiad ?
Et si les ordinateurs portables deviennent toujours plus petits et légers et bon marché, tout comme les téléphones plus performants, pourquoi m’embêter avec un objet qui ne me permettra que de lire ?
Probablement ces questions figurent-elles déjà dans les FAQ de tous ceux qui promeuvent aujourd’hui le livre électronique, et qu’elles seront vite balayées. Très vite, un équivalent pour le livre du lecteur mp3 pour le disque peut se généraliser. Il sera temps alors de s’interroger sur la pertinence des DRM, la tarification, les modèles économiques basés sur l’acquisition et ceux basés sur l’accès, l’interopérabilité des lecteurs…
Et vous, avez-vous utilisé déjà l’iLiad ou le Reader ? Ça vous a plu ?
Jeffrey Yamaguchi, Michael Crichton, et NEXTgencode…
Voici ce que Jeffrey Yamaguchi, on-line marketing manager chez Harper Collins, se donnerait comme conseil s’il pouvait parler au jeune débutant qu’il a été un jour (lu sur Book business) :
« Take chances, be creative, have fun with it, work hard, look for and try new ways of doing things. All those things sort of go hand-in-hand. It’s easy to say or give that advice and much harder to actually pull-off consistently, but I think the best work comes through when all those elements are in play. Oh … and learn how to sell. No matter what you are doing, you have to sell it. »
You have to sell it, man…
Et voici comment Jeffrey Yamaguchi, qui a bien écouté ses propres conseils, vend « Next », le dernier livre de Michael Crichton :
il a créé tout spécialement un site internet sur lequel on peut visualiser des vidéos promotionnelles vantant les produits d’une firme spécialisée dans les manipulations génétiques. NEXTgencode, c’est le nom de cette société fictive, peut vous fabriquer un chien qui restera éternellement jeune, des enfants dont vous choisirez le sexe, la couleur des yeux, la taille, le poids, les talents… Les vidéos qui s’affichent sur le site sont également diffusées sur la home page d’Harper Collins, sur YouTube, sur les sites de librairie en ligne, et dans certains programmes télévisés matinaux. C’est provocateur, assez drôle, grinçant et dérangeant, soigneusement réalisé.
Est-on allé aussi loin pour le site de lancement d’un ouvrage, ici dans l’hexagone ? Si oui, je veux bien cliquer sur quelques liens.
Et aussi, « on-line marketing manager », ça existe, dans les maisons d’éditions françaises ? Vous en connaissez ?
Qu’est-ce qu’un Zapp ?
Un zapp, ça se présente comme ça :

sur le site Gotzapp.
Pour fabriquez un Zapp, nous apprend Fred Cavazza, qui le tient du site Mashable,
- vous compilez un ensemble de contenus (texte, photos, animations, audio…) dans un petit paquet (ils appellent ça des Zapp) ;
- vous le publiez sur le site ;
- les utilisateurs peuvent le télécharger sur leur terminal mobile et le consulter à loisir.
Il y a également une dimension sociale très intéressante à ce service :
- chaque contributeur dispose de sa fiche et de son évaluation ;
- les Zapp sont notés et classés selon un système de taggs ;
- vous pouvez recommander un Zapp en envoyant un SMS à un ami.
Imaginons un « educ’ Zapp », un « memo Zapp », un « reviz’ Zapp » soit :
- Une liste de vocabulaire, sa prononciation, des images qui aident à mémoriser
- Les deux théorèmes et les 4 définitions qui vont tomber à coup sûr demain en contrôle de maths
- Les deux dernières strophes de ce poème d’Hugo, que la prof de Français s’acharne à vouloir nous faire apprendre par coeur
Et puis le prof de physique qui s’est mis en tête de nous faire fabriquer nous-même des Zapp. On a dû drôlement bosser la leçon pour réussir à choisir ce qu’on mettrait dans le Zapp. On a même fait des photos de notre manip en TP ! Ça donne drôlement bien, même en tout petit sur l’écran de mon portable…
Alors, Zapp ou pas Zapp ?
chez l’éditeur O’Reilly, le service Rough Cuts
Me.dium , ou le co-websurfing
Me.dium est une extension Firefox (ou IE) qui ouvre une fenêtre dans votre navigateur, et :
- permet de voir quels sites visitent actuellement les autres abonnés à Medium partageant vos centres d’intérêt, quels sites visitent actuellement ceux de vos amis qui sont abonnés
- permet à vos amis (abonnés) et aux abonnés partageant vos centres d’intérêt de savoir quels sites vous visitez actuellement
et permet à tout ce monde de rentrer en contact via une fenêtre de chat.
Les autres sont représentés par l’icône du site qu’ils sont en train de visiter, flottant dans une sorte de nuage, le clic sur une de ces icônes emmenant vers le site en question.
Cela transparaissait déjà dans mes précédents billets, je suis d’humeur gadget, ces jours-ci. Enfin, quelque chose me dit que les usages de me.dium pourraient aller au-delà du simple « coucou, trop drôle, toi aussi t’es sur le site de la starAc ? »
Avant c’était « My » (my Yahoo, MySpace), puis on a eu You (YouTube) maintenant c’est carrément « Me » (me.dium).
« the medium is the message », disait Mac Luhan. Que penserait-il de me.dium ?
Et aussi : notre narcissime pourra-t-il résister ?